Le début du salut...ou de l'enfer ?

Le grand bâtiment imposant se dressait devant lui. Des murs aux allures impénétrables et pas franchement accueillants lui tendaient pourtant les bras. Un taxi l'avait déposé en compagnie de sa soeur devant les grilles de l'établissement, ses parents ne voulant plus rien savoir de lui. Cela l'attristait beaucoup, mais il ne pouvait rien y faire. Et puis, au moins, il avait encore sa soeur. Elle était si gentille et le soutenait quoiqu'il advienne. Elle avait aussi l'air très triste de le voir partir, peut-être pour toujours. Elle était inquiète pour son petit frère adoré, mais d'un autre côté, peut-être que cet endroit finirait par aider le blondinet et le faire redevenir lui-même. Ce fut cet espoir qui l'empêchait d'attraper son frère par le bras pour le tirer loin de cet endroit sordide. Pourvu qu'ils ne le bourrent pas encore de médicaments... ces foutus médicaments qui l'avaient plus détruit qu'autre chose.

Alex se tenait à côté d'elle, sa main dans la sienne, et observait le bâtiment. Puis, il se tourna vers elle.

"C'est là que je vais habiter ?"

Sa soeur hocha la tête et lui sourit gentiment. Elle ne devait pas lui montrer qu'elle avait peur, qu'elle était inquiète. Alex finirait par le sentir, par le remarquer...même si actuellement, il se comportait comme un enfant et réfléchissait comme tel. Elle le prit dans ses bras et lui caressa doucement les cheveux.

"Ne t'en fais pas. On prendra bien soin de toi ici. Et je viendrai te voir aussi souvent que possible. Je te le promets, p'tit frère."

Alex leva les yeux vers elle et lui sourit. Un sourire innocent qui faillit briser le coeur de sa soeur. Elle s'en voulait tellement de l'abandonner ici, tout seul. Mais elle n'avait pas le choix. Elle l'accompagna jusqu'à l'entrée où on lui interdit d'aller plus loin. Alex ne comprenait pas pourquoi sa soeur n'avait pas le droit de venir avec lui. Cette dernière tenta de le rassurer, lui donna le sac qu'elle avait préparé pour lui et déposa un baiser sur son front avant de partir en luttant contre les larmes. Alex lui dit au revoir par un signe de la main avant de se tourner vers les deux hommes qui avaient interdit l'accès à sa soeur. Des vigiles sans doute. Ou des gardiens. C'était pareil.
L'un d'eux demanda à Alex de le suivre et ce fut ce qu'il fit. Il n'avait pas le choix.

Toutefois, il n'était pas rassuré. Cet endroit lui donnait la chair de poule pour une raison qui lui était encore inconnue. Et puis, il sentait une crise de paranoïa pointer le bout de son nez. Cet endroit était grand, les chances d'être observé étaient donc grandes ! Il regarda autour de lui, anxieux, resserrant sa prise sur la lanière de son sac. Ils finirent par arriver devant une porte, le bureau du directeur. Alex déglutit péniblement. Il avait évité la crise, mais le risque demeurait bien présent. Il se mordilla nerveusement la lèvre inférieure tandis que le gardien frappait à la porte avant de disparaître, laissant Alex seul. Il était tellement anxieux qu'il se fit pipi dessus. Heureusement, sa soeur avait insisté pour qu'il mette une couche, la catastrophe avait donc été évitée.

Et puis, il sentit les larmes lui monter aux yeux en repensant à sa soeur et au fait qu'il ne la reverrait plus avant un moment, qu'il passerait ses journées dans cet endroit qui ne lui disait rien qui vaille. Alors, il se raccrocha aux paroles de sa soeur: C'est pour ton bien. Ils vont s'occuper de toi et quand tu sortiras, tu seras guéri. Tu seras comme avant. Je viendrai te voir aussi souvent que possible. Je te le promets, p'tit frère.

Faust était toujours dans son bureau, comme à son habitude. Buvant une tasse de café, et fumant une cigarette. C'était une Blackstones, la tige de couleur noir avec sa fumée aux arômes de cerise embaumée toute la pièce, ainsi que les poupées. Il était tranquillement assit à son fauteuil capitonné, lisant attentivement un dossier médical. Celui d'un certain Alex Scott, nouveau futur patient.. euh.. pardon.. Poupée. Mais tout en lisant, cela rappelait quelque chose au directeur. Il se tourna pour accéder à son tiroir à dossier, l'ouvrit en grand, plongea sa main dedans et en sorti un bien plus gros, qu'il posa sur le bureau après avoir refermer le tiroir.

Sur l'entête était inscrit en lettres d'imprimerie "Yggdrasil Calliope Alighieni". Il avait prit le dossier de sa cousine. Car il voulait vérifier un truc... Tiens! Il le savait! La jeune patiente avait à peu près des symptômes similaire à ceux d'Alex. Hilarant non? Héhé...

Enfin bref, quelqu'un frappa à la porte, trois coups, bien sec, bien fort. Il reconnaissait ce toquage entre mille. Il s'agissait de Rodolf, l'un des deux gardiens de la porte. Faust ordonna d'entrer. Ce qui suivit était un garçon arien.. Enfin pardon, un blond aux yeux bleu quoi. N'oublions pas que Faust est allemand à moitié.

- Bonjour Alexandre, je suis Faust, le directeur de cet Institut, comment vas tu?

Alex avait peur. Peur de ce qui l’attendait derrière cette porte et surtout dans cette vie que serait désormais la sienne. Seul. Sans sa sœur adorée, sans personne qu’il connaissait. Pire : Il y avaient tellement de gens qui pourraient lui faire du mal, l’observer pendant des heures pour lui faire peur ou même le suivre partout pour l’entraîner dans un endroit désert où personne n’entendrait ses cris ! Oui, il se faisait des films, mais c’était toujours le cas. Parfois, il avait tout bonnement l’impression que le monde entier en avait après lui. C’était ridicule, on le lui avait répété à maintes reprises et quelque part, tout au fond de lui-même, il en était conscient. Néanmoins, c’était toujours plus fort que lui, il ne pouvait pas lutter contre cette peur panique qui s’emparait de lui à tout moment.

Bref, le gardien avait frappé à la porte du bureau du directeur, attendant le feu vert de ce dernier avant d’ouvrir la porte et inciter Alex à entrer . Puis, une fois qu’il fut à l’intérieur, l’homme referma la porte derrière lui et retourna vaquer à ses occupations, laissant donc le blondinet seul face au directeur. Il était impressionnant, assis ainsi derrière son bureau. Alex remarqua tout de suite les poupées présentes dans la pièce, ce qui l’étonna quelque peu. Mais avant qu’il n’ait pu dire quoique ce soit, le directeur le salua avant de lui demander comment il allait. Une seconde ? Pourquoi l’appelait-il comme ça ? Alex se mordilla nerveusement la lèvre inférieure, un tic dont il avait bien du mal à se débarrasser, puis il lança d’une petite voix trahissant son manque évident d’assurance :

 « Je m’appelle Alex. Juste…Alex. Et…j’ai peur… »

A quoi bon mentir en disant que tout allait bien dans le meilleur des mondes ? Et puis, le directeur d’un tel établissement devait être compréhensif face à ses patients, non ? Patients…Oui, Alex était bel un bien un patient, même si cette appellation ne lui plaisait guère. Il reposa son regard sur les poupées, tentant de calmer ses angoisses  par la même occasion. Puis, il reporta son attention sur le directeur.

« Vous aimez les poupées ? Elles sont jolies…»

Il avait dit ça avec toute l’innocence d’un enfant, car même si physiquement il n’en était plus un depuis un moment, mentalement il le redevenait de plus en plus. Et puis, il avait fait un compliment, non ? Enfin…ses angoisses finirent par reprendre le dessus et cette fois, il se mit à triturer ses doigts, n’osant plus regarder l’homme en face de lui.

« Qu’est-ce qu’on va faire de moi, ici ? J’ai peur…je veux rentrer… »

Héhé, Faust avait eu une bien bonne idée d'appeler le garçon par un prénom à rallonge qui n'était pas le sien. Car cela avait encore plus fait monter le stress que le jeune homme avait accumulé. Que tout cela était amusant. Ca lui rappelait le comportement de sa jeune cousine; Yggdrasil, en ce moment même enfermée à double tours dans une des cellules d'isolement les plus sombre de l'Institut. Entrain d'halluciner, car il l'avait drogué. Il sourit sadiquement à cette pensée. Puis revint à la réalité. Il se leva de son siège. Il fallait "mettre en confiance" le garçon, pour ne pas qu'il se méfie tout de suite de lui, et qu'il soit un peu obéissant. Se dirigeant vers une petite table ou une cafetière de café et une théière remplit de chocolat chaud se trouvait. Il se reservit une tasse de café, puis prit une tasse avec un chat kawaii dessus, et versa du chocolat dedans, avec un sucre. Les enfants aimaient bien quand les chocolat chaud étaient sucrés se souvint-il. Et il alla vers lui, lui tendant la tasse.

- Assieds-toi petit. Et tiens, prends, le chocolat est très bon.

Rahh.. Il détestait ce qu'il disait et faisait en cet instant, mais il était tellement bon acteur. Il prit alors sa tasse de café et en buva quelques gorgées. Tu peux le faire Faust, tiens encore un peu.

- Pardon, je croyais qu'Alex était un diminutif. Je ne ferais plus cette erreur Alex. C'est normal que tu as peur, tu ne connais pas cet endroit et ta soeur n'est pas la. Oui, j'adore les poupées, oui, elles sont magnifiques, ce sont comme mes enfants. Et toi aussi maintenant, tu es comme mon enfant; étant mon patient. Mais ne t'inquiète pas. Ici on va essayer de te faire aller mieux, sans te faire de mal, d'accord? Et tu pourras bientôt rentrer chez toi, mais si tu ne fais pas de petits efforts, ça ira moins vite.

Il jubilait intérieurement. Il disait le contraire de ce qu'il pensait. Il allait lui faire horriblement mal et peur, et ferait tout pour qu'il reste dans sa maison de poupée pour l'éternité...

Spoiler:

Alex avait peur et était plus anxieux que jamais. Certains signes ne trompaient pas et le directeur devait s'en être aperçu. En même temps, les craintes du jeune homme étaient fondées, non ? Il se retrouvait dans un lieu totalement inconnu, seul parmi des étrangers et ce, du jour au lendemain. C'était normal d'avoir peur en ces circonstances !
Le blondinet avait questionné le directeur sur ce qui allait lui arriver ici, espérant être un peu rassuré. Et le moins que l'on put dire, c'était que l'homme en face de lui avait plutôt réussi son coup.

Tout d'abord, il lui tendit une tasse remplie de chocolat chaud et l'invita à s'asseoir. Alex l'avait observé tout le long avant de s'asseoir et de saisir doucement la tasse qu'il tint à deux mains, pour se les réchauffer un peu. Il ne dit rien et se mit à souffler sur le chocolat avant de porter la tasse à ses lèvres pour en boire quelques gorgées. C'était délicieux ! Et ça l'aida à se calmer un peu. Nul doute que le directeur savait ce qu'il faisait.

"Merci. C'est très bon."

Il croisa un instant le regard du directeur lorsque ce dernier lui expliqua comment se déroulerait son séjour ici et le pire, c'est qu'il croyait tout ce qu'il lui racontait. Pourquoi lui mentirait-il ? Et puis, Alex était plutôt naïf. A vrai dire, il l'avait toujours été, mais depuis quelques temps, ça avait empiré et il croyait pratiquement tout ce qu'on lui disait sans remettre en question les paroles de ses interlocuteurs.
Tenant toujours la tasse entre ses mains, il observa le directeur, ou plutôt, sa tasse trop mignonne. Il avait envie de lui dire qu'il la trouvait vraiment chouette, mais on lui avait toujours dit d'écouter quand les grands parlaient. Alors, il ne dit rien et se contenta de hocher la tête, allant même jusqu'à esquisser un petit sourire lorsque le directeur eut terminé. Il voulait rentrer chez lui au plus vite, alors il ne voyait pas pourquoi il ne ferait pas d'efforts. Il fallait juste qu'on lui montre comment faire.

"Je ferai tout pour aller mieux. Je veux revoir ma soeur et je veux que...mes parents m'aiment...à nouveau."

En repensant à ses parents, il sentit les larmes lui monter aux yeux. Le fait que ses parents l'aient totalement renié lui faisait très mal au fond et il en souffrait, même s'il évitait de parler trop souvent d'eux.
Il posa la tasse et s'essuya les yeux, non sans renifler un bon coup. Puis, il esquissa un sourire un peu forcé en s'adressant au directeur.

"Vous êtes gentil, monsieur ! J'ai déjà moins peur."

Pauvre petit chou. Si seulement il savait...

Le petit jeu du directeur avait fait mouche auprès d'Alex qui baissait de plus en plus sa garde et éprouvait de moins en moins de peur au fil des minutes. Il fallait dire que l'homme en face de lui savait se montrer convaincant et vu qu'il savait exactement quoi faire pour mettre le blondinet en confiance, eh bien, ça n'avait rien de bien étonnant. Certes, une phrase qu'on lui avait dite un jour lui revint en mémoire..."Ne fais pas confiance aux inconnus et n'accepte rien qu'ils pourraient t'offrir." Mais le directeur n'était pas vraiment un inconnu, si ? Il l'avait accueilli dans son établissement pour l'aider à aller mieux. Du coup, selon la logique d'Alex, il n'avait aucune raison de se méfier ou d'avoir peur de lui.

Et puis, quelqu'un qui faisait des chocolats aussi bon ne pouvait pas être méchant ! Bref, à cet instant, tout allait bien dans le meilleur des mondes pour Alex qui était convaincu qu'on l'aiderait à aller mieux ici et qu'il reverrait bientôt sa famille. Il imaginait déjà ses parents l'accueillir à bras ouverts - pour changer - et lui dire qu'ils étaient fiers de lui, chose qui ne s'était encore jamais produite jusqu'ici. Il but une autre gorgée de chocolat avant de lever timidement les yeux vers le directeur qui venait de lui caresser les cheveux. Ça le fit même rougir légèrement.
Il écouta ensuite attentivement ce que le rouquin avait à lui dire, avant de hocher la tête.

"Oui. Je ferai tout ce que vous voudrez. Parce que je veux guérir. Et...ceux qui s'occuperont de moi...c'est pas ceux qui ont des blouses blanches ?"

Alex était peut-être en pleine régression, mais il n'était pas totalement débile pour autant et savait distinguer un médecin d'un patient ! Bien sûr, si certains patients s'amusaient à se déguiser en médecins ou si certains médecins se promenaient en civils, ce serait plus compliqué.
Il termina son chocolat et esquissa un petit sourire timide à l'attention du directeur.

"Je veux bien que vous me fassiez visiter. J'aurai moins peur avec vous et...je ne me perdrai pas."

Peut-être que grâce à la présence du directeur, il parviendrait à contrôler ses crises de paranoïa ? Oui, peut-être...c'était beau, l'espoir. Tant qu'il y en avait encore.

Alex était en confiance, il ne lui avait pas fallu longtemps. En même temps, quand on était aussi naïf que lui, cela n'avait rien de très étonnant. Et puis, le médecin jouait parfaitement la comédie, le blondinet n'y voyait que du feu. Il reçut alors une explication sur la différence entre les patients et le personnel médical. Alex avait cru la connaître, mais apparemment, il s'était trompé. En partie. Il devait donc faire attention aux badges et non aux blouses. Il hocha doucement la tête, faisant tourner sa tasse entre ses mains.

"D'accord. J'ai compris."

Le directeur lui proposa alors une petite visite de l'établissement, Alex n'allait pas dire non ! Et puis comme ça, il pourrait rester encore un peu avec lui ! Il esquissa un sourire et posa sa tasse vide sur le bureau.

"C'est bon, j'ai déjà fini !"

Il attrapa ensuite la main du directeur après s'être relevé, un sourire au visage.

"Vous êtes vraiment gentil, monsieur."

Ah, l'innocence ! Que c'était beau ! Enfin...tout dépendait de la situation. En tout cas, notre blondinet était fin prêt à partir à l'aventure !